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Article – Modélisation 3D du sous-sol : de l’échelle micrométrique à celle du réservoir

L’article intitulé « Characterization and origin of permeability-porosity heterogeneity in shallow-marine carbonates : from core scale to 3D reservoir dimension (Middle Jurassic, Paris Basin, France) » par Benjamin Brigaud, Benoît Vincent, Christophe Durlet, Jean-François Deconinck, Emmanuel Jobard, Niel Pickard, Béatrice Yven et Philippe Landrein est prêt pour une publication dans la revue Marine and Petroleum Geology.

Un des défis dans le domaine des sciences de la terre est d’arriver à mieux appréhender le changement d’échelle entre la caractéristique d’un échantillon de roche observée en laboratoire, parfois jusqu’à l’échelle micrométrique et son comportement in situ, dans le sous-sol à l’échelle plurikilométrique. Ce changement d’échelle peut s’avérer particulièrement important pour comprendre, prédire et ainsi visualiser en 3D certaines ressources présentes dans le sous-sol comme l’eau, les hydrocarbures ou les métaux. Les roches sédimentaires du sous-sol, notamment carbonatées, peuvent former des réservoirs pour les ressources en eau ou en hydrocarbures, dont une forte porosité et perméabilité est un gage de qualité. Ces aquifères ou réservoirs d’hydrocarbures sont étudiés à partir de forages, donnant un aperçu très ponctuel de la qualité, par exemple 2 km de long avec un diamètre ne dépassant pas 20 cm, de l’ensemble de la roche contenant cette ressource, dont le volume total peut atteindre plusieurs milliers de kilomètres cube.

Une collaboration entre universitaires (Université Paris-Sud et Université de Bourgogne) et industriels (Cambridge Carbonate, Andra, Statoil, Captair) dirigée par Benjamin Brigaud (Géosciences Paris Sud, Université Paris-Sud/CNRS) a apporté une méthode innovante sur ce changement d’échelle en étudiant un ensemble de roches carbonatées épais de 200 m et enfouis à plus de 500 m de profondeur dans l’Est du Bassin de Paris. Cette nouvelle méthode se déroule en cinq étapes. (1) La première consiste à reconstruire précisément, par une étude des faciès sédimentaires, la géométrie de l’ensemble formant un empilement d’une dizaine de couches. (2) La deuxième étape consiste à l’analyse en laboratoire de la perméabilité (de 0,01 mDarcy à 1 Darcy), de la porosité (de 1 à 17%), du rayon de l’espace connectant deux pores entre eux (variant de 0,25 µm à 32 µm) et surtout du signal en résonance magnétique nucléaire (RMN) des roches carbonatées du site prélevées dans un forage, rendant compte de leur hétérogénéité. Sur ces mêmes échantillons, l’espace poreux a été observé à très petite échelle au MEB afin de préciser la forme des pores ou leur variation de taille (de 1 µm à 100 µm). Ces analyses de laboratoire ont permis de redéfinir les équations permettant de calculer à partir du signal RMN, la porosité ou la perméabilité des roches carbonatées. (4) Dans une quatrième étape, le signal RMN a été mesuré dans 12 puits à partir d’une sonde. Les nouvelles équations utilisées ont permis d’avoir un enregistrement continu de la porosité sur presque 2 km. (5) Un logiciel de modélisation géologique performant a été utilisé afin de propager les caractéristiques de perméabilités et porosités mesurées à partir du signal RMN entre les 12 forages dans 109 millions de cellules mesurant 150 m de longueur, 150 m de large et 5 m de hauteur. Les investigations dans les forages permettent de connaître un volume d’environ 20 m3. Ce volume réellement investigué représente 1/1000 d’une cellule du modèle, à comparer aux 109 millions qu’il faut contraindre…

Cette calibration très fine des calculs de perméabilités à partir des signaux RMN mesurés en laboratoire et la mesure de la RMN sur 12 puits en diagraphie permettent d’observer la distribution hétérogène de la porosité et de la perméabilité depuis l’échelle ponctuelle dans les forages à celle d’un réservoir de 400 km3 modélisé en 3D.