Rentrée 2020

Durant cette crise sanitaire, avec plusieurs centaines de morts par jour, une bonne partie d’entre nous s’est consacrée à plein temps à gérer la vie en confinement, à s’occuper de ses proches, à faire l’école à ses enfants ou à prendre soin de ses parents âgés ou malades … pourtant le gouvernement nous a enjointd’assurer la continuité pédagogique à distance. Dans l’urgence, au prix d’un lourd investissement, sans pouvoir prendre le temps de la réflexion et sans moyen supplémentaire, nous avons répondu à cette exigence, afin de mettre en place les enseignements à distance pour assurer cette continuité. Toujours dans l’urgence, les tutelles ont ensuite voulu imposer les évaluations à distance.Aujourd’hui, le gouvernement accompagné d’un nombre croissant de président.e.s d’université veut faire croire que cette expérience est positive et en profiter pour promouvoir un enseignement présentiel prudentiel, c’est à dire un enseignement à distance qui dit ne dit pas son nom, dans lequel une très grande partie du présentiel serait remplacée par de l’enseignement à distance. La doyenne de l’UFR sciences propose un « scénario prudentiel dans le cas où le virus serait toujours en activité dans notre pays [..] qui pourrait nous amener rapidement en cas d’apparition d’un cluster à des mesures de fermeture de campus. ». Il s’agit donc d’enseigner à distance « au cas où » sans savoir quand et comment cet « au cas où » pourrait disparaître. Nous qui avons vécu cette expérience au plus proche du terrain, nous tenons à affirmer que dans la grande majorité des cas cette expérience a été négative. L’enseignement à distance est un enseignement dégradé qui ne s’adresse de fait qu’à une minorité d’étudiant.e.s bien équipé.e.s et bien entouré.e.s, amplifiant ainsi les inégalités sociales. Nous affirmons que les interactions physiques entre toutes les actrices et tous les acteurs, étudiant.e.s, enseignante.s, personnels techniques et administratifs sont au cœur de la démarche universitaire. Elles sont non seulement nécessaires à la transmission des raisonnements et des connaissances mais sont aussi constitutives de la construction des savoirs et de la vie sociale qui sont déterminants pour l’avenir des jeunes étudiante.s.Nous savons que l’enseignement à distance peut être adapté, et est déjà utilisé, dans des cas très spécifiques (enseignement professionnel, destiné à des étudiant.e.s ciblés, ou ne pouvant se déplacer par exemple). Par ailleurs, les outils numériques sont aujourd’hui largement utilisés par nous tou.te.s comme un ajout à notre activité d’enseignement en présentiel. Mais le distanciel et le numérique ne doivent en aucun cas être des palliatifs du manque criant d’investissement des pouvoirs publics dans l’Université, le logement étudiant et les transports en commun. En outre, ces outils numériques doivent être libres pour des raisons de sécurité et de confidentialité, et pour s’assurer que l’enseignement universitaire reste un service public et ne soit pas la proie d’officines privées d’enseignement à distance. Alors que les vannes de l’argent magique ont été ouvertes dans de nombreux secteurs économiques, rien n’a été fait pour les services publics comme la santé ou l’enseignement. Sauf reconfinement strict, nous refusons d’enseigner à distanceà la rentrée 2020-2021. L’université, avec le soutien de l’État, doit assurer ses missions en mettant en place des moyens, en termes de protection sanitaire pour tous, de locaux et de postes permanents, tant pour les enseignants que pour les BIATSS pour que, dans un contexte d’augmentation du nombre d’étudiant.e.s, nous puissions réellement enseigner.Des enseignants de l’université Paris-Saclay, résolument opposés à l’enseignement à distance, avec le soutien de SUD Éducation et de la FSU

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