Soutien aux collègues de Jean Monnet qui participent au mouvement de rétention de notes

CollDoc, syndicat de travailleur·ses précaires de l’Université Paris-Saclay (https://colldoc.fr), et la FSU de Saclay soutiennent les collègues de la Faculté Jean Monnet, qui  participent au mouvement national de rétention de notes (voir la lettre ouverte ci-dessous). 

Ce mouvement demande de doubler les rémunérations des vacationsactuellement payées 42,86/HETD, pour 4,2 heures de travail officiel soit un peu plus de 10 euros de l’heure, moins que le SMIC horaire. Pour certain·es doctorant·es et vacataires, il s’agit de leur unique ressource. Pour d’autres, c’est un complément à un petit salaire, qui subit l’inflation de plein fouet. 

Les collègues de Jean Monnet ne s’en tiennent pas là. Ils revendiquent également 

* l’application de la loi et la mensualisation effective des vacations

* la contractualisation des vacataires qui le souhaitent afin qu’ils et elles bénéficient des garanties liées au statut de travailleur : droit au chômage, cotisation pour les retraites, remboursement des frais de transport par l’employeur etc., 

* la prise en compte effective des heures de travail non rémunérées : surveillance d’examens, corrections de copies,… pour les vacataires, les 4,2 heures de travail effectives pour une heure équivalent TD sont très souvent sous-estimées. Dans l’ex-Bordeaux 4, un recensement en droit, en économie et en gestion donnait plutôt une moyenne de 6,9 heures.

– l’exonération des frais d’inscription pour les doctorants. 

Ces revendications sont soutenables d’un point de vue financier !

La mensualisation sans contractualisation requiert une révision des pratiques pour les services RH. Les heures de vacation effectuées doivent remonter suffisamment vite pour que leur mise en paiement se fasse dans le mois. La contractualisation, comme à Paris Nanterre, permettrait de passer sur une logique de service prévisionnel. Il s’agit ici essentiellement d’un gain de temps pour les RH.

Dans le rapport social unique de l’université en 2021*, les heures complémentaires et vacations représentent 2,4% de la masse salariale, soit environ 7 millions d’euros. En doubler le paiement représente donc un effort de 7 millions d’euros. Si on choisissait de concentrer l’effort sur les seules heures complémentaires des non permanents**, l’effort se réduirait à 3,85 millions d’euros.

L’exonération des frais d’inscription des doctorants, qui sont environ un millier à Paris-Saclay, se monterait à  480 000 euros.

En tout, on parle donc de 4,33 millions, à comparer à la trésorerie de l’université qui s’élève à 159 millions d’euros, dont 53,8 millions restent à disposition de l’université après l’ensemble des dépenses fléchées. Les ressources totales sur l’année 2021-2022 s’élevant à 482 millions d’euros, on parle d’un effort budgétaire de 0,82% pour les vacations des non permanents à 1,55% pour l’ensemble des vacations des ressources totales de l’établissement.

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NOTES

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*https://cirrus.universite-paris-saclay.fr/s/xQgap2MBz3ZrQyp 

** A l’Université d’Evry, les 130 000 heures complémentaires totales se partagent en 2017-2018 entre 53 000 heures complémentaires des permanents (41%) et 77 000 heures de vacation (59%). A l’Université Versailles Saint Quentin, en 2018-2019, le partage des 114 000 heures complémentaires totales se fait entre 53 000 heures complémentaires des permanents (46,5%) et 61 000 heures de vacations (53,5%). Les donnée manquent sur l’ENS Paris-Saclay, CentraleSupelec et AgroParisTech. Référence est parfois simplement faite à une augmentation du volume d’heures complémentaires totales (ENS) ; au montant en euros des vacations et des heures complémentaires des permanents, sans donner le coût d’une HETD (Agro) ; ou rien du tout (CS). Au niveau national, les heures de vacations représentent 25% des heures de cours totales et sont un peu plus nombreuses que les heures complémentaires des permanents. 

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LETTRE OUVERTE DES COLLEGUES DE JEAN MONNET

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« À l’attention de Mme Estelle IACONA, Présidente de l’Université Paris-Saclay, M. Boris BERNABÉ, doyen de la Faculté Jean Monnet, l’ensemble de la direction de l’Université Paris-Saclay et de la Faculté Jean Monnet, l’ensemble des personnels, des enseignants-chercheurs et des étudiants de la Faculté Jean Monnet,

Nous, collectif d’enseignantes et enseignants de la Faculté Jean Monnet, de toutes disciplines et de tous statuts (vacataires, contractuels et titulaires) attirons l’attention des destinataires de cette lettre sur les points suivants : 

Dans un contexte généralisé d’inflation massive et de mouvements nationaux contre la précarisation de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche1, nous rappelons le constat partagé que le modèle de l’Université publique se dégrade et fait l’objet d’une précarisation massive ; et que les conditions d’enseignement, laissées à l’abandon depuis plusieurs décennies, dépérissent et créent une impossibilité d’exercer dans des conditions dignes. 

Dans la continuité des revendications exprimées à la suite de la période de Covid par un collectif de doctorants-enseignants et restées lettre morte jusqu’ici, puis portées ensuite par le syndicat Colldoc, et autres collectifs et syndicats, 

Face au non-respect de la loi2 qui impose la mensualisation des vacations, entraînant leur paiement jusqu’à 6 mois après la fin du travail effectué, 

Face au travail gratuit, matérialisé par les heures de surveillance et de correction dépassant le volume horaire prévu dans nos contrats de travail,

 Face au taux horaire des travaux dirigés, dispensés par des diplômés d’un Bac+5 voire Bac+8, pour lesquels 1 heure en TD (rémunérée 42,86 euros brut) face aux étudiants demande 4 heures de travail (ce qui revient à 10,72 euros brut par heure) ce qui porte la rémunération en-dessous du SMIC (11,52 euros brut depuis le 1er janvier 2023), 

Face au taux horaire resté inchangé depuis les années 19803 sauf revalorisation de deux euros en 2017 lors du dégel du point d’indice4, et malgré l’inflation des dernières décennies, laquelle s’est fortement accentuée dernièrement, Face au caractère indispensable des doctorantes et doctorants pour assurer la majorité des travaux dirigés, des travaux de recherche doctoraux et de l’absurdité de payer son employeur pour pouvoir exercer un travail essentiel pour l’Université, 

Nous exigeons ces mesures minimales pour répondre aux obligations légales et à l’inflation, mais aussi pour contribuer à la réalisation des missions de service public de l’ESR dans des conditions de travail dignes : 

– Mensualisation du paiement des vacataires, 

– Contractualisation des vacataires précaires afin qu’ils et elles bénéficient des garanties liées au statut de travailleur : droit au chômage, cotisation pour les retraites, remboursement des frais de transport par l’employeur etc., 

– Prise en compte des heures de travail non rémunérées, 

– Doublement du taux horaires pour les travaux dirigés (passage à 80 euros brut autorisé par l’arrêté fixant le montant de rémunération des vacataires5) afin d’atteindre un salaire garantissant la dignité de ceux qui les effectuent ainsi qu’une rémunération à la hauteur de leur formation, 

– Exonération des frais d’inscription pour les doctorants. 

Dans l’attente d’une réponse claire de la direction et dans la continuité du mouvement national et concluant dans certaines universités, nous, chargé(e)s de travaux dirigés, maîtres(se)s de conférences et professeur(e)s du collectif, sommes prêt(e)s et organisé(e)s pour aller jusqu’à effectuer une rétention des notes du second semestre de l’année 2022/2023. Conscient(e)s de l’impact potentiel sur les étudiant(e)s, lesquel(le)s restent néanmoins victimes par ricochet de cette précarisation de l’Université, nous attendons de votre part une réaction rapide et satisfaisante.

Nous sommes certain(e)s que les directions de l’Université et de la Faculté ont les moyens de répondre immédiatement à cette situation, ce qui permettrait, pour tous, une fin d’année sereine. 

Nous sommes joignables à l’adresse suivante : Precaires.JeanMonnet@gmail.com 

L’adresse est ouverte à tous pour contact, questions et soutiens. Anonymat garanti. 

Le 24/04/2023, à Sceaux.

1 “Présidents d’universités, il est temps de payer vraiment vos vacataires”, Tribune à l’initiative de https://www.vacatairesorg/, Le Monde, édition du 4 avril 2023. 

2 Loi n° 202-1674 du 24 décembre 2020 de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l’enseignement supérieur, article 11. 

3 Arrêté du 6 novembre 1989 fixant les taux de rémunération des heures complémentaires, article 1, applicable sur renvois successifs depuis le décret n° 87-889 du 29 octobre 1987 relatif aux conditions de recrutement et d’emploi de vacataires pour l’enseignement supérieur. 

4 Passant de 40,91 euros brut à 42,86 euros brut de l’heure.

5 Arrêté du 6 novembre 1989 fixant les taux de rémunération des heures complémentaires, article 2. »

Nous nous associons et soutenons leurs démarche comme explicité dans notre précédent mail.

En solidarité,

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